Ma famille et autres animaux de Gerald Durrell


Largement méconnu en France, c’est par cette modeste chronique que cette criante injustice va tenter d’être réparée. En effet, l’œuvre dont il est ici question fait partie de celles qui bercent une enfance, devenant si familières que les histoires qui y sont contées nous paraissent des souvenirs et nous rappellent les douces soirées d’été bercées par les sons de la nature.

Ce roman est outre-manche ce que La Gloire de mon père, a été pour nous, petits français. Pour résumer, Ma famille et autres animaux de Gerald Durrell est de ces livres que nos voisins anglais lisent enfants, incités par l’école, mais dont la narration fait oublier le statut de lecture obligatoire pour devenir un plaisir, plaisir se retrouvant intact devenus grands. Narrant les aventures pittoresques d’une famille anglaise dans la campagne corfiote, ce roman initiatique imprégné de douceur méditerranéenne est un ode à l’île de Corfou, sa nature et ses habitants.

Gerrald Durrel fut une sorte de Cousteau made in England. Passionné de nature dès son plus jeune âge, preuve il en est les aventures narrées dans le roman, il n’a eu de cesse de chercher, étudier et protéger les espèces en danger. D’où cette probable propension à décrire comme un entomologiste minutieux les us et coutumes de sa famille avec une sorte de détachement amusé, comme on observe un animal aux mœurs étranges.

Il faut dire que la galerie de personnages est aussi savoureuse que profuse. À commencer par son frère Lawrence, célèbre écrivain à l’origine de l’idée incongrue de faire déménager sur une île grecque sa famille entière, qui remplit à merveille son rôle d’artiste susceptible, hypocondriaque et hystérique. Au casting également une soeur obsédée par son acné, un frère amateur de chasse, une mère  d’une patience infinie doublée d’une excellente cuisinière,  un médecin-naturaliste amateur de daphnies, et un chauffeur-ange gardien corfiote énorme et moustachu. Et ceci sans compter les innombrables bestioles que le petit Gerry s’évertue à ramener plus ou moins clandestinement sous le toit d’une maison devenue point de passage obligé pour tous, artistes farfelus étrangers comme paysans du cru.

Mais la protagoniste principale de ce livre c’est bien l’île de Corfou. Ce petit bout de Grèce à quelques encablures de l’Albanie enchante à chaque page le jeune Gerald Durrell par sa nature foisonnante et sa volupté méditerranéenne. Qu’il s’agisse de l’étonnant piège de petites mygales, la trouvaille d’un poussin de hibou, de la douceur du printemps de l’île ou les us et coutumes des corfiotes, le lecteur est happé par la narration enthousiaste de son auteur, à la fois riche en descriptions et très vivante. Le tout agrémenté d’une somme considérable d’histoires centrées autour de la famille Durrell, véritable ménagerie, au sens propre comme au figuré, qui a fait de ce livre, originellement prévu comme un recueil d’observations naturalistes, une chronique familiale  savoureuse et métissée, mélange de « tea time » et de pain à l’ail et aux olives.

Si vous avez un enfant, neveu, ou petit cousin à qui offrir un livre, n’hésitez pas, faites lui ce cadeau…et volez lui sans état d’âme par la même occasion, ce livre convenant parfaitement à une lecture placide bercée par le chant des cigales estivales.

Ma famille et autres animaux de Gerald Durrell
Paru aux éditions Gallmeister
Collection Nature Writing.
263 pages, 22 eur. env.