La belliqueuse Bordure Pacifique


Cette semaine sort le film Pacific Rim de Guillermo Del Toro, et je pense que c’est LE blockbuster de cet été. On se rend à la séance blasé, en se disant qu’on va encore assister à un gros feu d’artifices creux, un combat entre Transformers et Godzilla. Et on se prend en plein visage le spectacle le plus rafraîchissant de la saison.

Durant les quinze premières minutes, le film réussit à nous dépeindre le tableau d’un monde en crise qui essaie de survivre en résistant à une invasion, bien mieux et de façon bien plus crédible que World War Z ne le fait en deux heures.

Un Jägermeister ça cerf toujours

pacific rim affichePacific Rim raconte l’histoire d’une humanité qui commence à perdre tout espoir de survie face à l’invasion de kaiju, des monstres titanesques issus d’une faille inter-dimensionnelle dans les profondeurs de l’océan. Pour lutter contre ce fléau et mener la résistance, l’humanité construit des robots géants, les jaegers.

Guillermo Del Toro et son scénariste Travis Beacham (qui entre ce film et Le choc des titans est résolument fan de monstres géants) réussissent le tour de force de rendre hommage à la fois aux Mecha, ces armures et robots géants très populaires au Japon (mais aussi dans le reste du Monde) et aux Kaijū Eiga, ces films de monstres géants. Sans être spécialiste ni amateur, on a forcément entendu parler ou vu passer au moins un épisode de Goldorak, Patlabor, Macross, Gundam, Gantz, Sym-Bionic Titan, ou surtout Neon Genesis Evangelion. Mais le cinéphile pense aussi aux armures et autres exosquelette d’Aliens, Matrix Revolution, Le Géant de Fer et Avatar. Et Godzilla et toutes ses séquelles les plus laborieuses font depuis longtemps partie de la culture populaire, qu’on ne présente plus.

Les équipes qui se forment et l’idée de pilotage mixte nous rappellent aussi tous ces super sentaï, de Bioman aux Power Rangers mais sans le coté kitsch pourtant indissociable.

pacific rim scale
Pacific Rim
, fidèle à toute cette culture à laquelle il rend un vibrant hommage, emprunte des éléments à beaucoup de séries et films des deux premiers genres. On retrouve ainsi une faille d’où émerge des monstres, un système d’échange mental avec un liquide qui permet de se synchroniser pour piloter les jaegers ou une armure moulante, des éléments qui font penser à Evangelion.

On y voit des monstres avec des apparences qui mélangent insectes, crustacés, céphalopodes, mammifères, poissons et reptiles comme Godzilla et tous ses némésis, mais aussi comme tout le bestiaire de H.P. Lovecraft, déjà une référence prépondérante dans le cinéma de Del Toro.

Et comme dans beaucoup de séries mecha, on retrouve la notion de coalition mondiale avec des politiciens couards aveuglé par des projets vains, un capitalisme opportuniste qui tire profit de tout et en particulier du fléau, des militaires un peu dépassés par les événements mais qui gardent espoir ; et surtout on retrouve l’idée que des combats à cette échelle titanesque impliquent des dégâts monumentaux, un entretien des machines inquantifiable et une logistique du même ordre.

Le baroud d’honneur de l’humanité va faire du bruit

Le film contient quand même quelques stéréotypes et autres poncifs du genre. Je pense à cette équipe asiatique avec des triplés que l’on entend jamais parler, vêtus de survêtements rouges avec des motifs dragon doré. Ou alors une équipe de russes, un frère colossal et une sœur au look ultra-flashy, un peu too much. On y retrouve aussi un duo de scientifiques loufoques et antagonistes qui apportent leur lot de sourires. On peut voir aussi le typique pilote jeune et arrogant qui fini par reconnaître la valeur du héros et un passage Flashdance où le personnage principal fait de la soudure alors que sa passion est tout autre. On est donc obligé de considérer tout ceci au second degré, pour y voir un nouvel indice de la bonne humeur et de la légèreté d’un film qui ne se prend jamais trop au sérieux, pour notre plus grand plaisir.

Un des bons points du film est son casting, entre Charlie Hunnam (le Jax de Sons of Anarchy), Idris Elba (qu’on ne présente plus), Rinko Kikuchi (l’excellente Boom Boom dans Une arnaque presque parfaite), Diego Klattenhoff (le Mike de Homeland) ou les indispensables Ron Perlman et Santiago Segura pour ne citer qu’eux, on a droit une bande d’acteurs charismatiques et excellents qui servent le film, le rendant encore plus jouissif.

Pour une fois les États-Unis ne sont pas le centre du Monde, et les monstres ne s’attaquent pas qu’à eux. Les personnages principaux ne sont pas identifiés comme des Américains, entre Idris Elba, Charlie Hunnam qui sont anglais, Burn Gorman, Charlie Day, Ron Perlman et Clifton Collins Jr qui sont états-uniens, Santiago Segura qui est espagnol et Rinko Kikuji qui est japonaise, le tout sous la direction d’un mexicain, on est loin d’Independance Day et de son patriotisme Yankee.

pacific rim castpacific rim duo

Les krumpers ne font pas les meilleurs cameramen

On apprécie aussi le fait que les combats – et toutes les scènes d’actions en général -, ne nous fassent pas pleurer les yeux et ne nous rendent pas épileptiques. Tout en restant extrêmement spectaculaires, les scènes sont nettes, lisibles et ne ressemblent pas à un stroboscope filmé par un diabétique qui convulse. Michael Bay, prends-en de la graine. Les effets spéciaux sont magnifiques, d’autant plus qu’on a le temps de les apprécier. Le design des différents jaegers est très sympa, l’un ressemble à un vieux bombardier, l’autre à une attraction mécanique de foire, un autre à un scaphandre et un dernier à avion de chasse, éclectiques et subtils. Par moment ça m’a même évoqué l’apparence d’un Metroïd ou d’un Mégaman. Les kaiju ne sont pas en reste, ils sont terrifiants, gigantesques et uniques.

Coté musique, c’est également la classe, puisqu’on retrouve le compositeur Ramin Djawadi qui a œuvré sur Games of Thrones et la chanson du générique est chantée par Blake Perlman, fille de Ron, en duo avec RZA.

Le film est clairement calibré pour plaire à tout le monde, mais il possède cette valeur ajoutée, ces petits détails et références qui réjouissent les geeks que nous sommes, et qui en font un spectacle encore plus grandiose. Surtout quand Guillermo Del Toro n’oublie pas de dédier son film à Ray Harryhausen et Ishirō Honda et de remercier ses potes du crew des mexicains Alejandro González Iñárritu et Alfonso Cuarón mais aussi James Cameron.

Alors si vous ne devez voir qu’un film cet été, c’est sans hésitation que je vous recommande Pacific Rim.

 

Pacific Rim

de Guillermo Del Toro

17 Juillet 2013

avec Charlie Hunnam, Idris Elba, Rinko Kikuji, Max Martini, Robert Kazinski, Charlie Day, Clifton Collins Jr, Ron Perlman et Burn Gorman