Rectify : le couloir de la mort et de la vie


C’est par un incroyable détour que j’en suis arrivé à regarder la nouvelle série Rectify. En ces jours de chaleur étouffante, je voulais regarder un truc léger et un peu frais, on me recommande un film de surf. Va pour Chasing Mavericks avec Gerard « 300 » Butler. Le film a rempli son rôle de divertissement rafraîchissant mais ce qui est important c’est qu’il m’a permis de découvrir une actrice mignonne comme tout, Abigail Spencer (sosie officielle de Sarah Silverman).

rectify posterC’est en jetant un coup d’œil à sa filmographie que je suis tombé sur la série Rectify. Six épisodes, de bons échos, un pitch intrigant et une actrice qui vaut le déplacement, n’en jetez plus, comme dirait le Docteur, « Allons-y ! ».

Le fameux pitch de départ est le suivant, Daniel Holden, qui vient de passer 20 ans dans le couloir de la mort, est libéré suite à la découverte de preuves ADN qui l’innocentent momentanément, jusqu’à ce qu’un nouveau procès ait lieu. S’en suivent sept jours de retour tendu et difficile au village de Paulie dans ce Sud profond des Etats-Unis.

Autant le dire tout de suite, j’ai pris une énorme claque en voyant la première saison de ce drama (une deuxième saison est déjà signée), six épisodes de 40 minutes, un format assez british, mais d’une intensité hallucinante.

C’est le genre de série qui passe ou casse, il ne s’y passe pas grand chose, tout est dans les non-dits, les silences, les mystères et les interactions entre les personnages. C’est facile, à la fin de la première saison le spectateur n’a aucune certitude quant à l’innocence ou la culpabilité du personnage principal. On ne peut qu’extrapoler sur ce qu’il s’est vraiment passé et se faire sa propre opinion sur la personnalité de Daniel.

rectify abigail spencerParce qu’on se rend compte que Daniel Holden, joué par Aden Young (un sosie officiel de Tom Hardy), est un garçon un peu bizarre, absent, il semble être un peu autiste, apathique qui ne parle que de philosophie mais jamais de ce dont il est accusé. Il n’a pour ainsi dire quasiment pas vécu, coupé du monde et de toute interaction humaine. Il pensait mourir, il s’était fait à l’idée et maintenant il doit réapprendre à vivre. Sa famille ne sait pas comment réagir à tout cela.

Le noyau familial est composé de sa mère un peu dépassée par les événements, de sa sœur qui se bat sans cesse pour lui, un beau père que Daniel ne connait quasiment pas, un demi-frère adolescent, un autre demi-frère par alliance marié à une grenouille de bénitier bien pensante (sosie de Michelle Williams). Tout ce petit monde a plus ou moins une opinion sur Daniel mais ils doivent tous vivre dans une petite communauté où tout le monde se connait, pleine de préjugés et assez hostile dans l’ensemble.

La force de la série réside dans un mélange de silences, de non-dits, de philosophie, de visions différentes de la vie, de préjugés et de doutes. Les personnages sont extrêmement complexes, ils ont tous des failles, ils sont capables d’autant d’empathie que de mesquineries et autres bassesses. Le rythme est lent, lourd et accablant comme nous est souvent dépeinte la vie dans le Sud des États-Unis. Tout cela tient la route grâce à un excellent casting, Aden Young et Abigail Spencer qui joue la sœur en tête, mais le reste du casting n’est pas en reste.Elle est diffusée sur Sundance Channel, petite chaîne indépendante liée au Festival de cinéma indépendant du même nom et bébé de Robert Redford. Ce diffuseur donne déjà le ton de ce que peut être la série, une potentielle pépite.

rectify jailrectify famille

 

Pendant le premier épisode, j’ai pensé à la série Life, avec son personnage qui, après un long séjour en prison, en sort philosophe, avec une vision complètement décalée de la vie. Par la suite, je me suis dit qu’il y avait un coté Stephen King dans tout ça, l’aspect petite communauté ajouté à un personnage indolent façon John Coffee de La ligne verte. Si cette première saison y fait penser, elle est un cran au dessus grâce à son intensité dramatique, sa tension permanente, sa véracité dans l’approche des caractères humains et sa façon de faire réfléchir le spectateur plutôt que le tenir par la main et lui dire ce qu’il doit penser. C’est presque une expérience mystique qui fait réfléchir sur soi-même et sa relation aux autres.

La série créée, écrite et réalisée (deux fois sur trois) par Ray McKinnon est d’une cohérence et d’une maîtrise rare pour un premier essai. On connaissant surtout Ray McKinnon pour son travail d’acteur, notamment dans Sons of Anarchy, Take Shelter et Mud, mais ici, il pourrait avoir créé pas moins que la meilleure série drama de l’année.

Laissez vous tenter, en tout cas j’attends la suite avec impatience.

Sundance Channel

1 - 2013