Red is Dead…ly Awesome!


Red avant d’être un film, c’est surtout un comic-book. Un comic-book court, implacable et intense comme une balle qui traverse un crâne au ralenti en ne laissant qu’une compote de framboise peu ragoutante mais des plus esthétique. Fidèle à lui même, Warren Ellis, qui je vous le rappelle  est un de mes scénariste si ce n’est  mon scénariste préféré,   nous offre ici une nouvelle histoire simple mais profonde, porteuse de tous ces thèmes qui lui sont chers.  Politique, pouvoir, violence, capacités hors du commun, honneur ou amitié, on retrouve un peu de tout ça dans Red, comme dans beaucoup de ses œuvres, de Authority à No Hero en passant par Planetary ou Ocean. Comme à chaque fois il s’est associé avec un dessinateur de génie. Ici c’est Cully Hamner qui prête sont trait dynamique, rugueux, épuré  mais précis à l’histoire d’Ellis.

L’histoire en soi tient en quelques mots : Paul Moses est un agent de la C.I.A. à la retraite dont le principal talent est de tuer des gens. Une nouvelle administration prend place à la Maison Blanche et choisit de l’éliminer pour le travail qu’il a fait quand il était en service. L’heure du carnage a sonné !

Paul every day (Paul (mais pas le poulpe))

Mais comme je le disais, l’important n’est pas l’histoire mais le message derrière tout ça. Paul Moses est un retraité bien tranquille mais torturé par des souvenirs effroyables des exécutions qu’il a effectués pour son pays. Paul est un homme qui parle peu mais agit beaucoup, les dialogues sont rares mais comme toujours excellents ce qui les rend d’autant plus efficaces. Paul ne s’énerve pas, ne rit pas, il fait juste ce qui doit être fait pour sa tranquillité et pour qu’on l’oublie. Paul est un homme aux traits marqués, chauve aux yeux très clairs et au sourire jovial, une sorte de Bruce Willis aux yeux de loup avec le sourire diastème d’un Ernest Borgnine.  Paul sait se servir de toutes les armes et parmi celles-ci il y a le terrorisme. Paul est une arme lui-même, un outil encore très affuté et donc très dangereux. Il faut pas lui marcher sur les pieds à Paul!

Red u cul.

Toute cette vague de violence est déclenchée par un petit bureaucrate incompétent, un petit chef comme on peut en voir souvent, accessoirement directeur de la C.I.A.  Après son briefing de prise de poste il décide que Paul ne doit plus exister. Grossière erreur.

Confier une des agences de renseignement les plus influentes du Monde à un crétin arriviste élu pour son talent à nettoyer avec son organe buccal le fondement de certains supérieurs est déjà une erreur en soi. Mais provoquer le tueur le plus létal de l’agence en troublant sa retraite, c’est au delà de la bêtise.

Sous des atours de simple et court comic, entre thriller et espionnage un peu violent, se cache un véritable petit pamphlet politique, oscillant entre nihilisme et anarchie, dénonçant un système qui privilégie l’arrivisme sur la compétence et qui a tendance à oublier les pires heures de son Histoire cachée, faite d’assassinats, de coups d’état et autres vérités enterrées. En opposant la bureaucratie au travail de terrain, en démontrant qu’un monstre sans moralité peut se créer, on parvient à une tératologie de ce que peut engendrer le pouvoir. Le poids de la Mort touche tout le monde, et Elephant Man nous l’a prouvé, les monstres sont mal perçus mais  restent des humains. Déranger un monstre qui essayent d’oublier qu’il en est un, se révèle très mauvais pour la santé. La preuve.

Mais Red c’est aussi un film ! et quel film!

Je les veux Red Morts.

Le premier point commun entre les deux est le synopsis assez succinct  : Franck Moses est un jeune retraité de la C.I.A., il flirte avec une opératrice de son service retraite quand des hommes armés attentent à sa vie. Il va faire appel à ses amis tout aussi retraités et dangereux que lui pour comprendre ce qui se passe et se défendre puis contre-attaquer.

Ensuite on peut remarquer le bon choix de casting d’un Bruce Willis tout en calvitie qui prête toute sa coolitude et son efficacité d’action man à ce rôle. L’histoire du comic-book est considérablement étirée pour donner matière à un long métrage mais une partie du propos et de l’esprit de l’originel est resté. Le film a beaucoup perdu de la violence et du propos politique du comic-book mais quelque chose est resté. Ce que le film à perdu en ultra violence, il l’a gagné en humour et en fun.

Le comic-book  n’est que le point de départ de cette version alternative et plus comique de The Expendables, là où le film de Stallone était gore et bourrin, celui ci est drôle, spectaculaire et classieux.

Les Têtes Red

Le principal argument de vente du film, c’est son casting, un casting génial de monstre sacré du cinéma contemporains. La force c’est qu’ils sont tous issus d’horizons différents, tous des têtes d’affiches qui ne se sont croisés que rarement.

Bruce Willis joue encore la machine à tuer cool et chauve avec son petit sourire coin sarcastique il est un peu le fils prodigue de cette famille de tueurs fous. Morgan Freeman est le vieil agent libidineux, coquin qui l’air de rien est toujours aussi efficace, c’est un peu le tonton élégant de la famille.  John Malkovich est encore un doux dingue, psychotique, paranoïaque mais perspicace, il est un peu le frère pas mal fou sur qui on peut compter.  Helen Mirren est comme toujours formidable, une maman dangereuse mais aimante qui soutient et protège sa famille dans l’adversité toujours avec classe et accompagnée du papa russe un peu roublard Brian Cox. La jeune fiancée en mal d’émotions fortes est Mary Louise Parker qui se voit ici bien servie en la matière, elle apporte son teint diaphane, son regard malicieux, son sens de la comédie si particulier et son charme incomparable à l’aventure.  Ernest Borgnine est l’arrière grand père, l’ancêtre au dents du bonheur porteur de la connaissance et des bons conseils.

Coté méchants on a  le petit fils rebelle de la famille, Karl Urban l’agent responsable, jeune loup au dents longues qui exécute les ordres avec application. Richard Dreyfuss qui a toujours besoin d’un plus gros bateau (normal, il se l’est fait bouffer dans les Dents de la mer) est l’homme d’affaire qu’on adore détester qui protège Julian McMahon, politicien sans vergogne et couard.

Red almost digital cinema.

Dans le comics « red » fait référence au code d’alerte que déclenche Paul avec son retour à l’action, dans le film c’est l’acronyme de Retired Extremely Dangerous (Retraité(s) Extrêmement Dangereux) une gentille trouvaille qui montre aussi à quelle point tout ça ne se prend pas au sérieux. Il y a des clichés dans tous les sens et le réalisateur en joue pour notre plus grand plaisir. De romans de gare en carte postale, de méchants pas gentils en gentils chevaleresques rien ne nous est épargné pour notre plus grand bonheur.

Le film est un immense n’importe quoi, du grand spectacle avec des cascades et des situations incroyables, le tout est ultra divertissant, il y a des tonnes d’action,  de l’humour dans chaque scène, un complot politique quelque peu éventé et une dose réjouissante de folie. Tous les ingrédients pour passer un excellent moment.

En plein débat sur les retraites, on va dire que Red n’apporte rien si ce n’est une bonne détente, faute d’être une allégorie sur le repos bien mérité après des années de dur labeur.

Mais l’analyse profonde, si elle a jamais eu lieu, s’arrête là car à part quelques sous entendus sur des opérations clandestines présumées de l’Agence, le film n’est pas bien irrévérencieux ni engagé, juste très drôle, on débranche le cerveau et on apprécie.

Un comic-book  court mais percutant, un film divertissant, Red vaut vraiment le détour.

Red

de Warren Ellis - Cully Hamner

Panini comics Collection : 100% Wildstorm

80 pages - 11 €

20/10/2010

RED
Réalisateur: Robert Schwentke
Avec : Bruce Willis, Mary Louise Parker, Helen Mirren, Morgan Freeman, John Malkovich, Ernest Borgnine, Richard Dreyfuss, Julian McMahon, Karl Urban, Brian Cox, ...
États-Unis
genre : Thriller, Action, Comédie
1h51
Sortie le  17/11/2010