Sword of the Stranger de Masahiro Ando


Depuis sa création voici dix ans, le studio Bones n’a cessé d’accumuler les succès critiques et publics. On pense à Cowboy Bebop : Knockin’ on Heaven’s Door dont il avait assuré la coproduction avec Sunrise, mais au final Bones n’a que peu œuvré au cinéma. On garde aussi à l’esprit deux films tirés de séries TV, RahXephon : Pluralitas Concentio en 2003, puis Fullmetal Alchemist : Conqueror of Shamballa en 2005. Mais il aura fallu attendre septembre 2007 pour voir le premier long-métrage pensé comme une œuvre de cinéma à part entière : Sword of the Stranger de Masahiro Ando.

L’orphelin Kotaro et son chien Tobimaru tentent de survivre dans un Japon rendu exsangue par une série ininterrompue de luttes entre des seigneurs de la guerre. Réfugié dans un temple brûlé, Kotaro est agressé par des mercenaires venus de Chine pour servir les mystérieux desseins du puissant Bai-Luan. L’enfant est défendu in-extrémis par un mystérieux bretteur virtuose. Kotaro demande la protection de son sauveur en lui promettant de lui offrir sa seule richesse : une pierre précieuse. Le rônin accepte, sans se douter que cette mission va lui faire affronter les plus grands dangers et raviver des souvenirs particulièrement douloureux.

Sword of the Stranger est avant tout un projet personnel mené depuis 2003 par le réalisateur Masahiro Ando, dont c’est la première réalisation mais qui a fait ses armes chez Mamoru Oshii (Ghost in the Shell) et Rintaro (Metropolis) en tant qu’animateur clé. À cela, on peut ajouter le travail exceptionnel de l’équipe technique, notamment celui du directeur de l’animation Yoshiyuki Ito (chara-designer de Fullmetal Alchemist et de Soul Eater) et du chara-designer Tsunenori Saito (directeur de l’animation sur RahXephon, Mars Daybreak et Wolf’s Rain). Le scénario est de Fumihiko Takayama, qui a travaillé sur RahXephon mais qui est surtout connu pour avoir réalisé les OAV Mobile Suit Gundam 0080 et le film Patlabor WXIII. Voilà pour les références de l’équipe.

Si l’on prend le film dans son acception globale, on découvre un scénario relativement basique – un samouraï (Nanashi) en quête de rédemption, un enfant innocent (Kotarô) au cœur d’une histoire ésotérique, un guerrier puissant et énigmatique (Rarô), le tout dans un contexte historique proche du chaos – qui ne développe pas réellement les protagonistes ; on peut légitimement penser que l’on se trouve face à une énième production japonaise de genre.

Au gré des minutes qui passent, le film, se focalise sur l’essentiel et privilégie l’efficacité. Authentique chambara historique et violent, Sword of the Stranger décrit une période trouble du Japon féodal, tiraillé entre conflits, trahisons, état d’esprit insulaire, xénophobie latente et une transition brutale vers l’ère moderne qui marquera la réunification du pays après maintes guerres civiles. Le récit favorise l’action et enchaîne les scènes épiques. Malgré quelques (rares) choix douteux liés à l’utilisation de l’animation informatique, la mise en scène et l’animation mettent en exergue de redoutables combats, d’une vivacité et d’une brutalité jouissive. Réalisme et crédibilité se côtoient pour notre plus grand plaisir. Les guerriers chinois parlent en mandarin durant tout le film. Que dire de ces plans virevoltants où les lames s’entrechoquent, taillent, tranchent et coupent et déversent une pluie de membres et de sang ? Le dernier combat entre Nanashi et Rarô, qui se déroule dans un décor fascinant, est tout simplement magistral. Une dernière remarque sur la bande originale, réussie, qui sert parfaitement l’atmosphère du film.

Avec Sword of the Stranger et malgré un budget limité (4 millions d’euros), Masahiro Ando nous offre une première réalisation efficace qui augure de prochains opus de qualité. Laissez vous entraîner et plongez avec délectation dans les heures les plus sombres du Japon médiéval.

Sword of the Stranger (Sutorejia : Mukô hadan)

de Masahiro Andô

Japon, 2007 1h42.

Sorti le 27 mai 2009.

Scénariste : Fumihiko Takayama.
Musique : Naoki Sato.
Photographie : Yohei Miyahara.
Direction de l’animation : Yoshiyuki Ito.
Direction artistique : Atsushi Morikawa.
Interprètes : Tomoya Nagase (Nanashi), Yuuri Chinen (Kotarou).