The Fall, par Tarsem Singh


J’ai découvert ce film au hasard d’une page internet. Un heureux hasard. Réalisé par Tarsem Singh, le projet a été réalisé méticuleusement : quatre ans de travail ont été nécessaires pour le mener à bien. Après The Cell (2000) et avant Blanche Neige (2012), The Fall, par manque de distributeurs, n’a malheureusement eu que peu de succès. Et quand je regarde l’affiche, je me dis qu’elle n’est peut-être pas tout à fait étrangère à ce triste manque d’enthousiasme.

Affiche - The Fall The Fall est sorti en France en 2009, directement en DVD. Il est librement inspiré du film bulgare Yo ho ho, de Zako Heskija (1981). Mais c’est à Los Angeles, en 1920, que Tarsem Singh nous transporte. On y découvre Alexandria, fillette de 5 ans, hospitalisée suite à un bras cassé, ainsi que Roy, cascadeur qui a fait une mauvaise chute. Le jeune homme, immobilisé sur son lit, commence alors à lui conter une histoire pleine de brigands, de personnages divers et d’aventures. Le centre de cette histoire fantastique est la quête de la cachette du Gouverneur Odieux, qui a causé du tord aux cinq héros. Mais cette histoire aux aspects enfantins cache quelque chose de plus sombre et de plus triste, et le passé et les motivations de Roy se révèlent peu à peu. Lee Pace, que vous avez pu apercevoir dans Pushing Daisies, interprète de manière brillante ce jeune homme au cœur et au dos brisé. La formule magique d’un vieil homme réussira-t-elle à tout arranger ?

Il s’agit d’un film avec une esthétique poussée, pour lequel le tournage s’est étalé dans vingt pays différents. Les images, la mise en scène, tout est très recherché et obéit à un style graphique très léché. Les paysages, de grands espaces mis en valeurs par des mouvements de caméras bien choisis, sont sublimes et très diversifiés, comme s’il s’agissait d’un patchwork géant. Les costumes sont très travaillés et mettent en avant avec plus ou moins de subtilité les caractères et l’histoire des personnages. Charles Darwin, fasciné par toute créature vivante, porte un manteau rappelant les ailes d’un papillon. Luigi, spécialiste des explosif est vêtu de jaune et rouge évoquant les couleurs des flammes qu’il déclenche.

The FallPar certains aspects, ce film m’a rappelé Hero de Zhang Yimou, sorti en 2003, lequel chaque tableau avait été filmé avec une teinte majoritaire. Les décors et les couleurs y sont presque des personnages à part entière : c’est un film dont on savoure l’image autant que l’histoire. Comme cela devrait être le cas pour chaque film finalement. L’image n’est pas juste un bonus, elle sert véritablement le récit en dégageant des émotions diverses ou en symbolisant l’état d’esprit des personnages. Cet aspect graphique est un atout, que l’on retrouve rarement dans les films récents de Tarsem Singh.

Ce film est bouleversant. L’histoire est touchante, les personnages encore plus. Elle est focalisée sur la psychologie de ces derniers, tout en l’enveloppant dans l’univers onirique imaginé par Roy. Un univers dans lequel Alexandria va s’imposer peu à peu. Cette dualité des univers, cet affrontement entre le réel et le rêve, se retrouvent dans d’autres films. Le plus proche est Big Fish de Tim Burton : en effet, dans les deux cas, les deux mondes se mêlent, et des éléments du réel transparaissent dans le monde onirique, donnant une certaine véracité à l’histoire et aux sentiments des personnages qui la vivent. Le message, qu’il y a toujours de l’espoir, est glissé discrètement. Tellement qu’il n’est pas toujours facile à voir. Certains passages sont dérangeants, d’autres tirent des larmes, d’autres encore un sourire. On se retrouve un peu perdus, malmenés entre différents sentiments, sans trop savoir lequel adopter. Une belle histoire donc, dont il serait dommage de se passer.