Fly me to the Moon and let me Bá among the Stars
Alors que le grand prix du Festival d’Angoulême 2013 fait polémique par son coté réactionnaire et conservateur, j’aimerais revenir sur un des ouvrages présent dans la sélection officielle. Daytripper des jumeaux brésiliens Fábio Moon et Gabriel Bá est un roman graphique magnifique qui aurait mérité plus (même s’il a déjà reçu deux Eisner Award). Sorti en 2012 en France, Daytripper nous raconte toutes les vies possibles de Brás de Oliva Domingos, ses amours, ses morts, ses oeuvres, ses succès et ses échecs.
Graphiquement c’est très propre, le trait est fin, les visages expressifs, c’est dynamique, chaleureux et même les parties oniriques nous absorbent dans le(s) récit(s).
Les frères Moon et Bá ont écrit le scénario à quatre mains mais le dessin est quasi exclusivement l’œuvre de Fábio Moon. L’histoire est très riche et elle aborde des sujets aussi hétéroclites et importants que la vie, la mort, l’amitié, l’amour ou la famille. On n’évite pas quelques poncifs du genre mais le tout est tellement bien emballé et présenté d’une façon tellement rafraîchissante et personnelle qu’on se moque du déjà vu, déjà lu.
Les deux frères ont fait leurs armes depuis quelques années aux États-Unis, en travaillant sur différentes séries comme Casanova avec Matt Fraction ou Umbrella Academy avec Gerard Wray. Ils ont également collaboré avec le maître Mike Mignola (créateur de HellBoy) mais aussi avec le nouveau pape geek Joss Whedon, pour ne citer qu’eux.
Mais pour cette œuvre là, ils sont allé fouiller dans leur propre univers et dans leurs racines, l’histoire de Daytripper se déroule quasi exclusivement au Brésil à São Paulo, mais comme tous les grands récits, elle prend une dimension universelle qui parle à chaque lecteur.
On navigue entre les différentes réalités et possibilités des vies du personnage principal. Ses démons intérieurs, ses relations conflictuelles avec son père, la rencontre de l’amour, son fils, ses amis etc. Certains passages sont presque journalistiques quand d’autres sont magnifiquement oniriques.
Daytripper est le genre de livre qui vous touche, vous fait réfléchir et dont on a du mal à parler par pudeur. C’est une belle réussite de récit fantastique intimiste. En le lisant, on rit, on pleure, on met son propre parcours en perspective et on en ressort grandi d’une certaine façon. Ne passez pas à coté.