HELLBOY : Une série d’Enfer !


Que l’on soit adepte de comics ou pas, on a tous entendu parler un jour ou l’autre d’Hellboy, notamment grâce à l’adaptation cinématographique que nous a livrée Guillermo Del Toro au travers de deux films sortis respectivement en 2004 et 2008. Mon but n’est cependant pas de vous parler de ces deux derniers mais de vous faire (re)découvrir les fondations de cette pierre angulaire des comics indépendants. De sa genèse à tous ses dérivés en passant par son univers atypique, voyons ensemble de quoi il en retourne.

Les Germes de la Destruction

À l’origine d’Hellboy, on trouve un homme : Mike Mignola. Ce dessinateur californien né en 1962 débute sa carrière chez Marvel en œuvrant sur des séries telles que Hulk. Il passe ensuite chez DC Comics où il travaille comme dessinateur principal sur la mini-série L’Odyssée Cosmique (Cosmic Odyssey en VO, 1988) avec Jim Starlin ou encore sur le one-shot A Tale Of The Batman: Gotham by Gaslight (1989) avec Brian Augustyn.

En 1990, il retourne travailler pour la maison de Stan Lee et joint ses pinceaux à la plume de Walter Simonson sur le one-shot Wolverine : Jungle Saga (Wolverine : The Jungle Adventure). Mais c’est en 1991 que le destin artistique de Mike Mignola va prendre un tournant décisif.

Le tout premier dessin d'Hellboy, celui à l'origine de tout!

Cette même année, il livre un dessin promotionnel en noir et blanc représentant un démon portant le nom d’Hellboy. Ce dernier est malgré tout très éloigné du personnage définitif et n’est à l’époque qu’un dessin comme un autre pour l’artiste. Cependant, l’idée d’un « démon super-héros » prénommé Hellboy obsède de plus en plus Mignola qui décide alors de développer le personnage.

En 1993, c’est en couverture d’un fanzine italien qu’il livre le premier « véritable » prototype de son personnage. Des différences subsistent entre ce premier Hellboy et celui que l’on connaît aujourd’hui (notamment la couleur de la peau qui est alors grise) mais l’essence même du personnage est belle et bien là !

Pour voir une version définitive du personnage, il faut attendre la Comic-Con de San Diego en Août 1993. C’est dans le San Diego Comic-Con Comics #2, édité par Dark Horse Comics à l’occasion de la convention, que l’on retrouve la toute première histoire d’Hellboy, dessinée (bien évidemment) par Mike Mignola sur un scénario de John Byrne (connu pour avoir notamment travaillé sur X-Men, Les 4 Fantastiques, Batman et surtout Superman).

C’est l’année suivante, en mars 1994 plus précisément, que débute réellement la publication de la série chez Dark Horse. Mignola, toujours avec l’aide de Byrne, lance la mini-série Les Germes de la Destruction (Seed of Destruction). Cette dernière est récompensée par deux Eisner Awards (l’équivalent des oscars pour le monde des comics) et permet de lancer Hellboy sous les feux de la rampe.

La publication est toujours en cours aujourd’hui même si Mike Mignola a depuis un peu lâché la bride de son bébé, ne s’occupant « plus que » du scénario, des couvertures et de la supervision artistique, confiant le dessin à des artistes tels que Richard Corben (connu pour son travail sur Heavy Metal, la version américaine du magazine français culte Métal Hurlant) ou Duncan Fegredo.

Le monsieur n’est cependant pas en reste et a livré ces dernières années, outre les séries appartenant au même univers qu’Hellboy, de brillant ouvrages tels que L’Homme à la Tête de Vis et autres Histoires Déjantées (The Amazing Screw-On Head, récompensé par un Eisner Award), Baltimore ou encore le futuriste Ironwolf.

À côté du monde du comic book, Mignola a aussi œuvré dans d’autres médias, notamment sur le dessin-animé Batman au début des années 1990 (celui que beaucoup d’entre nous ont regardé durant leur enfance) et sur le long métrage de Walt Disney Atlantide, l’Empire Perdu sorti en 2001 et sur lequel son trait est largement identifiable sur les personnages ainsi que sur les arrière-plans.

Le Diable s’habille en Parka

Mais alors Hellboy, concrètement, de quoi ça parle ? Pour ceux qui ne connaîtraient pas le pitch de départ, plantons le décor de façon simple, claire et efficace !

Hellboy est un démon humanoïde au physique proche d’un diable
(peau rouge, cornes et queue) possédant une main droite disproportionnée en pierre, portant un long imperméable, fumant le cigare et affrontant créatures folkloriques, démons, revenants nazis et autres forces anciennes, monstrueuses et tentaculaires.

L’histoire débute en 1944. Face au recul de ses troupes suite au débarquement allié, le IIIe Reich, via son département de recherches sur le paranormal et les sciences occultes, décide de jouer une de ses dernières cartes en invoquant sur terre une entité démoniaque afin de pouvoir reprendre le dessus. C’est Raspoutine (oui, oui, lui-même !) qui s’occupe du rituel et ouvre un portail menant aux Enfers (ou du moins à une dimension infernale). Cependant, les choses ne se passent pas vraiment comme prévu et c’est une section des forces alliées qui recueille la créature et la baptise « Hellboy » de par son apparence. Une fois adulte, ce dernier intègre le Bureau de Recherche et de Défense sur le Paranormal (Bureau for Paranormal Research & Defense ou BPRD), une organisation chargée d’étudier et de combattre les manifestations surnaturelles. En son sein, il participe à de nombreuses missions qui le mèneront aux quatre coins du globe.

 

Démons & Merveilles

La Baba Yaga, figure emblématique du folklore slave et antagoniste récurrent de la série


Ce qui fait de la série Hellboy une œuvre à part entière, c’est tout d’abord sa direction artistique. Que l’on soit sensible ou non au trait de Mike Mignola, on ne peut rester insensible à son style unique, reconnaissable entre mille, constitué d’une esthétique sombre aux lignes tranchées, de clairs-obscurs et de contrastes. Ce dernier est d’ailleurs décrit par Alan Moore comme « la rencontre entre l’expressionnisme allemand et Jack Kirby » (rien que ça…) et permet à Mignola de mettre en place une galerie de personnages sortant de l’ordinaire et évoluant dans un univers à la fois sombre et haut en couleur.

C’est d’ailleurs cet univers qui est l’essence même de la série. Ce dernier emprunte énormément à de nombreux écrivains fantastiques de la fin du XIXe et du début du XXe siècle, notamment Howard Phillips Lovecraft (des tentacules, en veux-tu ? En voilà !), Edgar Allan Poe et Arthur Machen ; ainsi qu’au folklore (principalement celte mais aussi scandinave, russe ou encore asiatique), le tout dans un traitement proche des pulp magazines et avec une écriture parfaitement maîtrisée se situant entre un style « comics » classique et un style beaucoup plus littéraire.

L’enfer, c’est les autres

Le monde dépeint dans Hellboy étant d’une incroyable richesse et les personnages étant nombreux et atypiques, de nombreuses déclinaisons de la série ont vu le jour.

Du côté des spin-offs tout d’abord, avec B.P.R.D. qui, comme son nom l’indique, se concentre sur les missions menées par le Bureau de Recherche et de Défense sur le Paranormal et plus particulièrement sur les péripéties de l’équipe d’Hellboy après que celui-ci ait démissionné de l’organisation.

a href= »https://www.myleneboyrie.fr/sites/mandorine/wp-content/uploads//2012/06/bprd-91.jpg »>La série Abe Sapien est dédiée au personnage du même nom. On y découvre le passé et les missions en solitaire de l’homme-poisson, membre du BPRD et meilleur ami d’Hellboy.< Lobster Johnson est une série inédite en France, consacrée aux aventures de Johnson le Homard, sorte de super-héros énigmatique et décalé, vivant dans les années 1930 et apparaissant dans la série originale.

Enfin, Sir Edward Grey, Witchfinder est quant à lui le petit dernier des spin-offs d’Hellboy. Lui aussi inédit chez nous, il s’intéresse à Sir Edward Grey (on s’en serait douté…), détective du paranormal habitant le Londres du XIXe siècle qui devient, après avoir sauvé la vie de la reine Victoria d’un occulte danger, le détective du paranormal officiel de la cour d’Angleterre.

Ces quatre séries ont chacune leur importance et complètent parfaitement l’œuvre originale. D’autres ont, quant à elles, un intérêt beaucoup plus limité (Hellboy : Histoires Bizarres), voire inexistant (Hellboy Junior). Notons aussi l’existence de quelques crossovers, notamment un avec Batman, ainsi que d’un artbook sobrement intitulé La Bible Infernale.

Le personnage d’Hellboy ainsi que son univers apparaissent aussi (avec plus ou moins de brio) dans de nombreux autres médias et produits. À côté des deux films réalisés par Guillermo Del Toro, on trouve un dessin animé, des jeux vidéo, des romans et même un jeu de rôle. Sans compter les nombreux produits dérivés…

Que voulez-vous… Même les démons n’échappent pas à l’enfer du marketing… !

 

Hellboy, de Mike Mignola
Éditions Delcourt
Nombre de volumes parus en France : 12
Prix : compris 13€ et 18€ (varie selon les volumes)

B.P.R.D., de Mike Mignola
Éditions Delcourt
Nombre de volumes parus en France : 10
Prix : compris entre 13€ et 15€ (varie selon les volumes)

Abe Sapien
Éditions Delcourt
Nombre de volumes parus en France : 2
Prix indicatif : 14€

http://www.artofmikemignola.com/