Les reines de l’ovale


A Mandorine on vous a déjà parlé de choses fort variées : de livres, de cinématographe, de concerts, de poussettes, de femmes nues ou d’illustrés, mais on ne vous avait encore jamais parlé de sport. Oui, cette chose qui fait transpirer, qui rend le souffle court et endolorit les muscles. Il faut un début à tout, et c’est à travers le Roller Derby, la discipline la plus rock’n’roll d’entre toutes, que nous vous proposons cette plongée dans l’univers de l’effort si cher à Pierre de Coubertin.

 

Roulez jeunesse

Roller derby, mais qu’est-ce donc? A la base le concept est simple, mais comme votre serviteur est feignant il va charger Wikipédia de répondre :

« C’est un sport d’équipe de contact se pratiquant en patin à roulettes sur une piste de forme ovale, le but du jeu étant pour l’un des joueurs de réussir à dépasser en un laps de temps donné les joueurs adverses sans se faire projeter au sol ni sortir de la piste. »

Discipline assez ancienne, puisqu’elle remonterait aux années 30, elle a depuis les seventies subi une traversée du désert achevée depuis le début du nouveau millénaire par un sursaut d’engouement populaire sur le continent nord-américain. A la base sport mixte et un peu scénarisé, il a été repris dans ses formes mais changé dans le fond par un noyau de nouveaux pratiquants se conjuguant au féminin. Car en effet, sa renaissance passe quasi exclusivement par les filles, qui se sont appropriées la discipline pour en faire un genre de grand défouloir entre punk-attitude, ruades et expression du soi, ce qui a lui a assuré une popularité aussi contagieuse que rapide, et a brillamment démontré que les sports de contact ne sont pas l’apanage de la testostérone.

 

Hot Wheels

Ce cocktail sport de contact-originalité-théatralité, démarré sous des auspices plutôt underground et rockabilly, a donc su séduire une large frange de jeunes femmes ayant envie d’en découdre sévère, au point que le Roller Derby constitue aujourd’hui une galaxie de ligues dans un certains nombres de pays, États-Unis en tête. La riante cité Burdigalienne ne pouvait pas être en reste et a lead-jammé (est passé en tête quoi) comme étant la première ville de notre belle patrie à se doter d’une équipe dès 2009, suivie aujourd’hui par une cinquantaine de formations à travers la France. Les Petites Morts, équipe composée de la fine fleur du roller derby bordelais, sillonnent désormais l’hexagone pour imposer crânement leur loi sur la piste.

 
Comme tout sport de contact qui se respecte, le Roller Derby est extrêmement codifié (1), avec sa cohorte d’arbitres veillant au bon déroulement de la partie. Loin de l’image de brutes épaisses, les joueuses, harnachées pour en découdre, doivent en fait faire preuve de tonicité, de vitesse, d’équilibre, de tactique, d’audace, et parfois, si elles ne sont pas prises par la patrouille, d’un peu de fourberie. Leurs tenues de match (shorts, jupes, bas résilles, et t-shirts customisés) héritée du renouveau underground, empruntent énormément à l’esthétique punk, pin-up ou rockabilly, et les maquillages sont là pour achever de se singulariser. Sans parler des pseudo, noms donnant la touche finale à ces avatars de guerrières théâtralisés, sexy et fortes, mêlant humour, références et esprit trash, qui rendent la lecture d’une feuille de match bien plus savoureuse que dans n’importe quel autre sport.

 

Roller de match

Une rencontre de Roller Derby c’est certes un match sur le terrain mais aussi une ambiance. Du sport du dimanche il en récupère quelques codes : le bon vieux gymnase universitaire qui fait remonter en nous des souvenirs plus ou moins agréables, le stand de bouffe pour faire rentrer des sous, les ventes de goodies. Sauf que de fanion du F.C. Canéjan section poussin ou de merguez-saucisse il n’y a point, c’est plutôt de jolis t-shirts avec têtes de morts, des gâteaux aux glaçages étranges ou une variété surprenante de matériel de patinage qui nous sont proposés dans les différents stands. Seule la bière, boisson des dieux, reste là, et heureusement, en dénominateur commun, preuve que ces girlz ont du goût.

Autour de la piste le public est nombreux et varié, montrant que la discipline fait de nombreux adeptes. Familles, jeunes ou moins jeunes, étudiants, gothiques, hipsters, punkachiens ou rockabilly’s, journaleux à grosse caméra (un peu ignorants de géographie au passage) ou photographes du dimanche, l’échantillon est si varié qu’il donnerait des rêves humides à un sondeur de Sofres. Sur la piste, les participantes se donnent à fond et y vont de bon cœur, grimées dans leurs habits de lumière en guerrières à roulettes, prêtes à en découdre vaillamment dans le respect des règles, qui sont fort nombreuses, et encadrées par une horde d’arbitres. Les Jams s’enchaînent et on se prend facilement au jeu, applaudissant un dépassement hardi et malicieux d’une jammeuse, ou grondant au coup de fesse bien placé d’une bloqueuse entraînant une spectaculaire chute en cascade. Les lois de Newton étant implacables, et le sol ayant l’air aussi dur que les adversaires, les blessures et ecchymoses sont légion, mais rien n’entache la notion de plaisir et de sportivité que l’on ressent dans ces rencontres, à la manière du rugby à papa des images Épinal où l’on se piétinait amoureusement avant d’en rigoler autour d’un ballon de rouge. Alors si dimanche après midi, vous voulez échapper au gigot des beaux parents, prétextez une bonne gueule de bois et allez faire un saut à la Halle des Sports pour un dernier tour de piste avant le printemps.

 
 

Dimanche 2 Décembre – 15H
Halle des Sports allée Pierre de Coubertin – Talence
Ouverture des portes : 14h
Entrée : 5€ (3€ pour les encartés)
Prix spéciaux gangs et gratuit pour les -12 ans

 
 
 
 


(1) Pour les règles, le déroulement, etc., plutôt que de doublonner, allez faire un saut sur le site des Petites morts, bien plus complet et expliquant fort bien les tenants et aboutissants de ce charmant sport.